« Tu es prêtre pour toujours »
De David. Mélodie.
(1) Adresse de IHVH à mon seigneur :
« Assieds-toi à ma droite,
Jusqu’à ce que je fasse de tes ennemis un escabeau pour tes pieds.
(2) IHVH enverra de Sion le sceptre de ta force.
Domine au plus intime de tes ennemis !
(3) Ton peuple est généreux au jour de ta puissance.
Dans la magnificence de la sainteté,
Depuis la matrice,
Depuis l’aurore,
La rosée de tes enfants est pour toi.
(4) IHVH a juré et il n’y reviendra pas :
Tu es prêtre pour toujours,
À la manière de Roi de Justice.
(5) Mon seigneur est à ta droite,
Il pourfend des rois au jour de son souffle irrité.
(6) Il juge les nations remplies de cadavres,
Il pourfend les têtes sur la terre immense.
(7) Au torrent sur le chemin il boit,
C’est pourquoi il relève la tête. »
Qui est le seigneur de qui ?
Dès le départ, quand il s’agit de l’ensemble du texte, on sait qui parle. Il n’en sera pas de même par la suite.
Adresse de IHVH à mon seigneur :
De toute évidence, c’est IHVH qui parle. Mais qui lui prête sa voix ? On ne le sait pas Quel qu’il soit, on sait que ce messager a un seigneur, et que c’est vers celui-ci que le message est dirigé. Mais qui est ce seigneur ? On ne le sait pas davantage. En tout cas, c’est à lui qu’il est dit : Assieds-toi à ma droite…
Où s’arrête l’adresse faite par IHVH ? Est-elle limitée à la première phrase qui lui est attribuée ? Se prolonge-t-elle lorsqu’on lit : IHVH enverra de Sion le sceptre de ta force… ? On peut l’estimer. Dès lors, ne faut-il pas considérer que, dans toute la suite du discours, jusqu’à la fin, c’est toujours IHVH qui parle, et toujours au même destinataire, à savoir au seigneur du messager ? Ainsi, lorsque le nom de IHVH se rencontre une fois encore - IHVH l’a juré et il n’y reviendra pas…- on devrait comprendre que IHVH parle de lui-même, à la troisième personne du singulier, de ce qu’il a fait, comme lorsqu’on lisait IHVH enverra de Sion…mais qu’il ne cesse pas pour autant de s’adresser à quelqu’un. D’ailleurs, n’est-ce pas lui, IHVH, qui déclare aussitôt : Tu es prêtre pour toujours, à la manière de Roi de Justice ?
Ou bien est-ce quelqu’un d’autre que IHVH qui parle, le messager, par exemple ? Mais alors porte-t-il encore la parole de IHVH lui-même ou bien en formule-t-il une conséquence ? On peut pencher pour cette hypothèse quand, aussitôt après cette déclaration, on lit : mon seigneur est à ta droite, il pourfend des rois…Mais on est cependant partagé.
En effet, jusqu’alors le discours s’adressait au seigneur du messager. Or, il faudrait admettre que le messager parle maintenant en son propre nom, au destinataire du message. Mais alors la question se fait plus insistante : on veut pouvoir identifier avec assurance qui est désigné par ce titre de seigneur ? S’agit-il à présent de quelqu’un d’autre que le destinataire du message ? Ce titre ne serait-il pas décerné à IHVH lui-même par le messager - mon seigneur est à ta droite...- tandis qu’il s’adresse, brièvement d’ailleurs, à son propre seigneur avant de ne plus parler, jusqu’à la fin, à un allocutaire précis clairement identifiable ?
Devant toutes ces incertitudes, on a au moins une assurance. Un message est envoyé et ce message vient de IHVH. Donc, quel qu’il soit en lui-même, IHVH parle et sa parole est portée par celle d’un messager qui est en ce monde. Peut-être est-ce la raison pour laquelle il est si difficile de faire la part entre ce qui vient de IHVH et ce qui est le fait du messager. En un sens, tout appartient à l’un et à l’autre intégralement, quoique pas de la même façon.
Un point est sûr : c’est au seigneur du messager que le discours de IHVH s’adresse et, même lorsque le titre de seigneur semble être donné à IHVH, celui qui l’avait reçu d’abord continue à être le destinataire de la parole : mon seigneur est à ta droite.
Cette dernière déclaration mérite de recevoir la plus grande attention. En effet, dès le début du Psaume, IHVH commandait à mon seigneur en ces termes : assieds-toi à ma droite. On peut donc supposer qu’entre ces deux moments sont survenus des événements qui peuvent expliquer que mon seigneur ait changé de place, qu’après avoir siégé à la droite de IHVH, il ait maintenant IHVH à sa droite à lui et que ce dernier puisse porter le titre de seigneur, qui était d’abord reconnu au destinataire du message.
Mais on a aussi la liberté de faire une autre hypothèse. Pourquoi, lorsqu’il dit : mon seigneur est à ta droite, le messager ne s’adresserait-il pas maintenant à IHVH en personne ? Pourquoi, jusqu’à la fin du Psaume, ne l’entretiendrait-il pas de ce qu’il fait, lui, IHVH, en étant désormais flanqué à sa droite de celui qu’il avait appelé à y siéger ?
Quoi qu’il en soit, y a un trait commun à toutes ces interrogations, si diverses qu’elles soient. On se demande de qui le messager affirme et reconnaît la seigneurie : est-il soumis, comme à un seigneur, au destinataire du message ou à l’émetteur de celui-ci, c’est-à-dire à IHVH ou encore à l’un et à l’autre ? Du coup, on attend de la réponse qui sera donnée, de découvrir qui il est lui-même.
Or, on peut raisonnablement estimer que, pour répondre à ces interrogations, l’inspection du contenu même du message puisse être d’un grand secours. C’est donc à ce contenu qu’il convient maintenant de s’attacher.
Le temps qui passe et le temps qui dure
De toute évidence le message annonce un combat. Or, dans la présentation de ce combat, le temps est organisé d’une façon tout à fait singulière.
« Assieds-toi à ma droite,
Jusqu’à ce que je fasse de tes ennemis un escabeau pour tes pieds…
Le destinataire du message est invité à prendre place - la place d’honneur ? - auprès de IHVH sans se mêler lui-même aux péripéties de la lutte qui durera un certain temps. Car il y a un délai avant que les ennemis de mon seigneur ne soient placés sous ses pieds, tels un escabeau. Or, pendant tout ce temps, le seul à agir sera IHVH. Il revendique pour lui-même cette fonction de chef. Il livre un combat qui s’achèvera par une victoire, non contre ses propres ennemis mais contre ceux de mon seigneur. Car mon seigneur a des ennemis mais c’est IHVH qui mène contre eux les opérations. Dès lors, qui aura vaincu ? IHVH ? Mon seigneur ? Qui le dira ? Cette question, qui semble s’imposer, n’est après tout peut-être pas pertinente. L’important, semble-t-il, c’est la victoire. Or, elle st assurée.
Pourtant, il semble bien que mon seigneur soit associé au combat.
IHVH enverra de Sion le sceptre de ta force.
Qui parle ? IHVH ? Pourquoi pas ? Mais c’est peut-être, plutôt, le messager, qui commente, avant de rapporter littéralement les propos de IHVH adressés à mon seigneur :
« Domine au plus intime des tes ennemis ! »
Toujours est-il qu’il y a un lieu, quelque part en ce monde, qui recèle de la force. C’est Sion. C’est là que IHVH ira chercher, comme dans une réserve, de quoi armer mon seigneur et rendre manifeste sa souveraineté en lui conférant un sceptre. Car, semble-t-il, c’est bien lui tout de même ou, pour le moins, lui aussi, qui est engagé dans la mêlée, c’est lui qui doit l’emporter avec ou, du moins, pas sans IHVH.
Ton peuple est généreux au jour de ta puissance.
Dans la magnificence de la sainteté,
Depuis la matrice, depuis l’aurore
La rosée de tes enfants est pour toi.
Ces ressources, présentes en Sion, c’est le peuple qui est né de mon seigneur lui-même. Or, depuis qu’il existe, lors même de sa conception, depuis la matrice, dès qu’il a commencé à poindre, comme l’aurore, ce peuple est pour lui, il lui est tout acquis, il est prêt à se dépenser sans compter le jour où lui-même déploie sa puissance. Une telle profusion, si réelle et terrestre qu’elle soit, est cependant plus qu’humaine : elle déploie en ce monde la magnificence de la sainteté, elle illumine le temps de l’histoire d’une splendeur sacrée.
IHVH a juré et n’y reviendra pas :
Tu es prêtre pour toujours,
À la manière de Roi de Justice.
À ce laps de temps au terme duquel le triomphe revient à IHVH et aussi, conjointement, à mon seigneur, il y a une raison d’être. Celle-ci n’est autre qu’une alliance infrangible, déclarée par un serment irrévocable de IHVH. Cette alliance n’a pas d’âge, pas de date, bien qu’on la présente comme un événement passé, elle court dans le temps qui passe, où se produisent d’autres événements, où la victoire déjà remportée, réellement mais virtuellement, est cependant encore à venir.
Quel que soit celui qui parle ici, IHVH ou son messager, en un sens, peu importe : il faut bien que quelqu’un dévoile le secret du temps, l’articule en mots et en phrases. Ce secret est là désormais, inscrit en toutes lettres. Dans ce pacte, IHVH est pris et toi aussi, qui que tu sois, dans un présent qui n’en finit pas de se renouveler. Car c’en est fini des moments successifs et des délais. De ce fait, te voilà sacré à jamais, comme un prêtre ou même comme un roi. La puissance et la force qui se déploient sont celles de la justice. En somme, tout ce qui est détruit mérite de l’être, rien n’est anéanti qui déjà ne soit justement condamné.
Mon seigneur est à ta droite,
Il pourfend des rois au jour de son souffle irrité.
Il juge les nations remplies de cadavres,
Il pourfend les têtes sur la terre immense.
Le temps, comme un chemin, continue de dérouler son fil. Sur le bord, mon seigneur – à moins que ce ne soit, il ne faut pas l’exclure, IHVH en personne - trouve de l’eau pour refaire ses forces. Il n’a pas à cesser d’aller et d’avancer : le temps lui-même est pour lui une source qui lui redonne vigueur.
Au torrent sur le chemin il boit,
C’est pourquoi il relève la tête.
L’instant
On se rappelle les difficultés qu’on a rencontrées pour discerner avec certitude qui parle et à qui la parole est adressée. À cet embarras s’en ajoutait un autre : il était malaisé de décider qui était le seigneur de qui. Tout se jouait, on l’a compris, entre le messager, IHVH et celui qui est désigné, énigmatiquement, comme mon seigneur. Or, il est possible maintenant de revenir sur ces difficultés et, peut-être, de les supprimer, pourvu qu’on veuille bien exploiter la distinction, à l’intérieur du temps lui-même, entre deux temps, le temps qui passe et le temps qui dure.
…Mon seigneur est à ta droite,
Il pourfend des rois au jour de son souffle irrité.
Il juge les nations remplies de cadavres,
Il pourfend les têtes sur la terre immense.
Au torrent sur le chemin il boit,
C’est pourquoi il relève la tête.»
La traduction qu’on lit ici rend tous les verbes par le présent du français. On aurait pu tout aussi bien les rendre par le futur. Mais, qu’elles soient, dans notre langue, au présent ou au futur, les actions mentionnées ici ne sont pas achevées au moment où elles sont énoncées : elles sont marquées par l’inaccomplissement, comme l’indique la forme du verbe dans la langue originale. De ce fait, on peut considérer qu’elles ont encore à recevoir un surplus, qui les conduira à leur terme.
On peut inférer de cette observation que celui qui parle ainsi est le messager. Il avait déjà dit, dès l’ouverture du Psaume : Parole de IHVH à mon seigneur. Quand ici il dit, de nouveau, mon seigneur, c’est la même personne qu’il désigne. Mais, maintenant, il en parle, il parle d’elle, en s’adressant à IHVH lui-même. Aussi bien emploie-t-il le mode inaccompli, celui qui convient pour exprimer ce qui est le fait de IHVH. En effet, IHVH relève, dans son agir, de ce qu’on a nommé ici le temps qui dure et il communique la vertu propre de ce temps à celui en qui, pour qui et avec qui il agit, c’est-à-dire à mon seigneur. Cependant, le temps peut aussi changer dans son expression et être rendu en français par le futur. Pourquoi ? Parce qu’il se plie alors aux conditions de ce qui arrive successivement dans le temps qui passe, qui est celui du messager et de son seigneur.
D’une certaine façon cette répartition des temps était déjà virtuellement présente, on pouvait l’attendre, quand on lisait :
« Assieds-toi à ma droite,
Jusqu’à ce que je fasse des tes ennemis un escabeau pour tes pieds…
On avait relevé qu’un délai était introduit. Autrement dit, IHVH se soumettait en quelque sorte au temps propre du messager et de son seigneur, au temps qui passe. Dès lors qu’importe qu’on lise, aussitôt après, IHVH enverra… plutôt que IHVH envoie… ! Le futur signifie cette allégeance de IHVH au temps qui passe, et celle-ci est plus clairement discernable encore avec l’emploi du passé, quand on lit :
IHVH a juré et il n’y reviendra pas :…
Qui que ce soit qui parle ici, IHVH ou le messager, la transition se fait entre le temps qui passe - IHVH a juré…- et le temps qui dure - et il n’y reviendra pas - et elle est accomplie dans l’énoncé du serment qui, très explicitement, fait état du toujours, de ce qu’on peut convenir de nommer éternité :
Tu es prêtre pour toujours,
À la manière de Roi de Justice.
Mon seigneur est à ta droite,
Il pourfend des rois au jour de son souffle irrité…
On peut, si l’on y tient, traduire par Il pourfendra. On signifierait ainsi que l’événement ne s’est pas encore produit dans le temps qui passe, que celui-ci est prégnant d’un autre temps, de celui qui dure, auquel il impose, pour ainsi dire, un délai dans l’accomplissement de l’action. En réalité, dans ce temps qui passe, mon seigneur est prêtre pour toujours. Sa fonction l’apparente au temps qui dure, au temps de IHVH.
En somme, dans le destinataire du message, en mon seigneur, s’actualise le passage du temps qui dure dans le temps qui passe. C’est d’ailleurs la réalité d’un tel passage que le messager affirme quand il désigne comme son seigneur le destinataire du message, en déclarant : Adresse de IHVH à mon seigneur… On pourrait dire qu’il en confesse ce passage, qu’il le proclame, qu’il l’annonce. En effet, il ne regarde pas ce passage comme du dehors : il s’y intègre lui-même par le titre de seigneur - mon seigneur ! - qu’il donne au destinataire du message. Bref, c’est à lui aussi, messager, de façon dérivée, comme au sujet d’un souverain, que s’adresse le message dont il semble seulement informer le lecteur. En effet, pour que le lecteur reçoive ce message comme adressé à lui-même, il faudra qu’il prenne la place du messager et, à son tour, dise mon seigneur au destinataire du message.
Au risque de paraître parler spatialement du temps, on peut dire qu’il y a un lieu vide, disponible pour qui veut bien s’y placer, et c’est, ici, ce qu’on propose de nommer l’instant. Tel le site propre du destinataire dans toute communication. Ce lieu est occupé d’abord par celui à qui IHVH dit : Tu es prêtre pour toujours …Mais le messager peut se mettre, lui aussi, en ce même lieu, pour autant qu’il est assujetti à ce destinataire, puisqu’il le reconnaît comme son seigneur. Quant au lecteur, quel qu’il soit, rien n’empêche qu’il prenne la place du messager, qu’il se situe, lui aussi, dans l’instant. Et il apparaît alors que cet instant n’appartient ni seulement au temps qui passe ni seulement au temps qui dure : il est au croisement de l’un avec l’autre, non pas hors du temps, une troisième instance de celui-ci, puisqu’il est autre que le temps qui passe et que le temps qui dure.
Qui est l’ennemi de qui ?
Mais on ne peut oublier que la résidence dans l’instant s’atteint de haute lutte. On n’y parvient jamais sans que la peine du combat soit ressentie en même temps que la joie de la victoire, comme si l’une et l’autre, toutes distinctes qu’elles soient, coïncidaient. Il y a tant d’ennemis, en effet, qui détournent chacun d’habiter l’instant, et d’abord l’attachement exclusif au seul temps qui passe ou la fuite éperdue dans le seul temps qui dure.
De quelle autorité dispose-t-on pour identifier ainsi, soit comme attachement au seul temps qui passe soit comme fuite dans le seul temps qui dure, les ennemis à vaincre sans cesse de nouveau pour parvenir à exister dans l’instant ?
Ce qui donne capacité pour définir les ennemis comme on vient de le faire, c’est d’être entré soi-même dans l’expérience du temps tel qu’on l’a caractérisé, c’est d’exister en endurant en soi-même la croisée des deux temps, celui qui passe et celui qui dure. Faute d’appartenir sans l’avoir choisi à une telle expérience, à une existence divisée et, simultanément, rassemblée dans la croix de l’instant, nul ne peut reconnaître comme des adversaires qu’il lui faut vaincre soit le temps qui passe soit le temps qui dure.
Au fond, des ennemis livrent un combat à mon seigneur. Voilà ce que déclare le messager, comme aussi bien son seigneur le déclare pareillement lui-même car ses ennemis sont les siens. Quant à l’identité et à la nature de ces ennemis, elles apparaissent dans la façon même dont ils sont attaqués et vaincus : dans l’épreuve même que chacun fait d’un temps dans lequel le déchirement le dispute à la réconciliation ou, pour parler comme Kierkegaard, l’angoisse à la foi.
Après avoir été annoncée comme le terme d’un délai et, surtout, comme l’issue d’une lutte violente, la victoire semble venir comme si elle allait de soi, tant elle est affirmée sereinement dans la vision sur laquelle se termine le Psaume, tant la continuité semble l’emporter sur la rupture :
Au torrent sur le chemin il boit,
C’est pourquoi il relève la tête.
Pourquoi boire sinon parce qu’on a soif aussi longtemps que se poursuit la bataille, c’est-à-dire aussi longtemps qu’on est engagé dans un temps qui passe. Mais, en buvant, on échappe à la soif en sorte que l’on n’est pas abattu, qu’on relève la tête, pour autant qu’on appartient aussi au temps qui dure. Ainsi est-on toujours dans le temps, car il n’y a rien d’autre que le temps, non pas le temps et autre chose que lui mais dans le seul réel qui soit, dans le temps, qui se compose de celui qui passe et de celui qui dure et, aussi, de leur synthèse, l’instant.
Ainsi l’instant, disponible pour l’angoisse et pour la foi, se présente-t-il comme la forme d’une certaine expérience du temps dans le temps. On y accède par l’effet d’une grâce mais celle-ci, étrangement, honore un seigneur qui n’est pas intronisé définitivement avant qu’une victoire ne soit remportée, bien qu’il soit prêtre pour toujours :
« Assieds-toi à ma droite,
Jusqu’à ce que je fasse de tes ennemis un escabeau pour tes pieds…
On ne peut pourtant pas estimer que cette grâce ne serait qu’une faveur, arbitrairement accordée. Elle couronne une éminente dignité, possédée dès l’origine, depuis la matrice, depuis l’aurore par celui qui est
…prêtre pour toujours,
À la manière de Roi de Justice.
S’il y a quelque chose de surprenant et, en définitive, d’incompréhensible, voire de scandaleux, c’est l’obligation pour IHVH d’engager une lutte meurtrière, de faire des cadavres, de pourfendre les têtes sur la terre immense. En effet, comment se fait-il que le règne de sa juste grâce s’impose au terme d’un combat par une extermination ou, du moins, comment se fait-il qu’on célèbre ce règne comme un triomphe sur des rois qui sont des ennemis ? Bref, que s’est-il donc passé dans l’histoire pour que la justice advienne par la violence ? Ne faut-il pas entendre, à la suite de Pascal, que « le royaume de Dieu ne consistait pas en la chair, mais en l’esprit, que les ennemis des hommes n’étaient pas les Babyloniens, mais leurs passions… » ?
Clamart, le 19 août 2007