Lc 1, 39-56

L'accomplissement de ce qui a été dit ! Réalisons bien qu'une parole n'est pas vraiment dite, n'est pas vraiment donnée, si elle n'est pas tenue. Tenir parole, c'est donc remplir ce que nous avons dit. Mais le remplir de quoi ? Et, quand il s'agit d'une parole qui a été prononcée de la part du Seigneur, en quoi donc celle-ci atteindra-t-elle son accomplissement, c'est-à-dire son achèvement, son plein ?

C'est notre foi qui se présente comme l'aboutissement et le fruit de la parole que nous avons entendue et reçue. Dans notre foi, dans le fait même que nous croyons, en effet, une parole qui vient jusqu'à nous, dans nos oreilles et dans notre cœur, de plus loin que notre histoire, va jusqu'au bout d'elle-même, parce qu'elle arrive là, en nous, au plus secret de notre être, devenant toujours plus ce que nous sommes, nous transformant en elle. Ainsi sommes-nous rendus heureux. Bienheureuse, celle qui a cru en l'accomplissement de ce qui lui a été dit de la part du Seigneur !

Mais à quoi, à quel signe reconnaîtrons-nous que la parole du Seigneur porte en nous, comme son effet dernier, notre foi ?

Elisabeth déclare : L'enfant a tressailli d'allégresse en mon sein. C'est à notre joie que nous reconnaissons notre foi. Mais cette joie, la joie de croire, est bien singulière. Elle éclate en nous, du sein de nous-même, à la façon d'une vie qui est là, survenue en nous, qui attend que se produise encore une naissance. La foi fait de tout croyant une mère, une mère en laquelle, tel un petit enfant à naître, la vie a été déposée et bondit, dans l'impatience de se manifester au grand jour.

Or, dès qu'Elisabeth entendit la salutation de Marie, l'enfant tressaillit en son sein, et Elisabeth fut remplie d'Esprit Saint. La foi, la joie de la foi, la vie en attente de son éclat plénier passent d'une mère à l'autre, de Marie à Elisabeth, et parviennent jusqu'au sein comblé de chaque croyant. En effet, une salutation, qui est la bonne nouvelle d'un salut, nous est adressée interminablement, vient jusqu'à nous pour s'élancer sans cesse hors de nous, comme une vie intarissable. Aussi en sommes-nous émerveillés. Comment m'est-il donné que vienne à moi la mère de mon Seigneur ? Car, vois-tu, dès l'instant où ta salutation a frappé mes oreilles, l'enfant a tressailli d'allégresse en mon sein.

Guy LAFON